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Familles dans le monde

« Les enfants forts sont moteur de changement social »

16/11/2021 - Votre famille est votre fondation. C'est à partir d’elle que les enfants grandissent et construisent leur avenir. Si cette fondation n’est pas assez solide, le développement des enfants est menacé. Les travailleurs soutenant les familles en RD Congo et au Burundi tentent de prévenir cette situation grâce à une approche holistique. Un outil digital leur ouvre la voie vers l’élaboration d’un plan de développement adapté à chaque famille.

MamanDaniel

© Federico Varrasso

Obstacles

Tous les parents souhaitent offrir un bon environnement dans lequel grandir à leurs enfants. Mais, parfois, les familles font face à des obstacles qu'elles ont du mal à surmonter toutes seules. De nombreuses familles en RD Congo et au Burundi ne sont pas en mesure d’offrir à leurs enfants les soins dont ils ont besoin pour devenir des adultes forts.

Le programme Ŝanĝo de l'organisation pour le développement de l'enfant SOS Villages d'Enfants renforce ces familles en situation de vulnérabilité. Son approche sur mesure pour chaque famille donne aux enfants, aux familles et à la communauté les moyens de garantir eux-mêmes le bon développement des enfants.


Une question de survie

« Ici, dès que vous devenez veuve, vous devenez une mendiante », explique Ziraji, une mère congolaise de cinq enfants et participante au programme de renforcement de la famille. « Quand j'ai perdu mon mari, c'est devenu une question de survie pour nous. »

Les mères célibataires constituent un groupe vulnérable dans le monde entier, y compris au Burundi et en RD Congo. Elles représentent une part importante du public cible du programme Ŝanĝo.

« Le programme nous a aidés à reprendre contact avec la société, poursuit Ziraji. Je suis devenue membre d'une coopérative qui fabrique et vend des vêtements traditionnels. Les frais de scolarité de deux des enfants ont été pris en charge temporairement par SOS Villages d'Enfants. Nous avons reçu une chèvre pour le lait et pour l’élevage. »

« Ici, dès que vous devenez veuve, vous devenez une mendiante »

Ziraji

Des enfants forts

Ishara, sa fille aînée, ajoute : « Je ne savais pas si je pourrais étudier. Je ne savais pas si je pourrais compter dans la société, avoir un rôle. Mais, grâce au programme et aux personnes qui en font partie, je compte à nouveau. Nous sommes à nouveau vus comme des êtres humains. »

Ishara joue aussi un rôle dans sa communauté. Elle est membre de l'un des comités locaux des droits de l'enfant que le programme soutient. Elle contribue à renforcer le soutien local aux droits de l'enfant. Ishara donne ainsi vie au slogan du programme Ŝanĝo : « Les enfants forts changent le monde. »

« Je ne savais pas si je pourrais compter dans la société, avoir un rôle. Mais, grâce au programme et aux personnes qui en font partie, je compte à nouveau. »

Ishara

« Nous y croyons aussi », explique Oscar Nahayo, coordinateur du programme au Burundi. « Les enfants forts, qui grandissent en bonne santé et ont la possibilité de développer leurs talents, sont un moteur du changement social. Le meilleur moyen d'y parvenir est de leur permettre de grandir dans une famille équilibrée et forte. »


La pauvreté multidimensionnelle

Problème : si l'on se penche sur la pauvreté multidimensionnelle, c'est-à-dire la pauvreté financière mais aussi la pauvreté en termes de santé, de logement, de situation de travail, de bien-être, d'éducation ou d'exclusion sociale, 78 % des enfants au Burundi se situent sous le seuil de pauvreté dans au moins trois dimensions.

Oscar : « Nous savons que les enfants qui grandissent dans la pauvreté multidimensionnelle sévère courent un risque élevé de perdre la protection et les soins de leurs parents ou des autres personnes qui s'occupent d'eux. Ils risquent alors de se retrouver seuls. Nous voulons absolument éviter cela avec ce programme. »

Dans le cas de Ziraji et d’Ishara, la difficulté majeure était l’exclusion sociale et le manque de revenus. Les enfants ne pouvaient donc pas aller à l'école, avoir accès aux soins médicaux et se nourrir correctement. En les mettant en contact avec une coopérative, en développant une activité génératrice de revenus et des contacts sociaux, la famille a pu faire un grand pas en avant.

Une approche holistique

Les différentes dimensions étant très souvent liées entre elles, le programme adopte une approche holistique. « Si nous voulons améliorer durablement la situation d'une famille, nous devons partir d'une image globale de sa situation », explique Oscar.

Pour cette analyse, la branche internationale de SOS Villages d'Enfants a développé un outil aujourd'hui utilisé dans une centaine de pays où l'organisation est active. Et c'est là qu'intervient Nelly Keza : Nelly a elle-même bénéficié de l'aide de SOS Villages d'Enfants lorsqu'elle était enfant et est aujourd'hui responsable du suivi et de l'évaluation du programme Ŝanĝo au Burundi.

« Chaque accompagnement commence par une analyse sur sept dimensions. Cela nous donne une bonne idée de là où les besoins sont les plus importants. »

Nelly

Nelly : « Chaque accompagnement commence par une analyse sur sept dimensions réalisée par un assistant social avec la famille : santé, bien-être social et affectif, éducation, moyens de subsistance, logement, protection et prise en charge. Cette analyse part de la perspective de l'enfant : Quel est le score obtenu par chaque enfant de la famille pour chacune des dimensions ? »

« Cela nous donne une bonne idée de là où les besoins sont les plus importants. Nous avons récemment commencé à faire ce travail avec des tablettes, ce qui signifie que toutes les informations arrivent directement dans le système. Cela fait gagner du temps aux assistants sociaux car, auparavant, l'analyse se faisait sur papier. Elle a ensuite été digitalisée. »

Exemple d'une analyse des sept dimensions d'une famille. Vert signifie que le besoin est satisfait, orange qu'il est partiellement satisfait, rouge qu'il ne l'est pas du tout. Gris signifie « non applicable ».

Exemple d'une analyse des sept dimensions d'une famille. Vert signifie que le besoin est satisfait, orange qu'il est partiellement satisfait, rouge qu'il ne l'est pas du tout. Gris signifie « non applicable ».


Un plan de développement individuel

À partir de l'analyse des dimensions, les assistants sociaux élaborent avec les familles un plan de développement adapté et sur mesure pour chacune. Ce plan contient à la fois des objectifs concrets et des actions concrètes. Il est aussi le point de départ pour mesurer les progrès éventuels.

« Nous pouvons déterminer objectivement si la famille a fait ou non des progrès. »

Nelly

« Nous refaisons l’analyse des différentes dimensions annuellement et pouvons donc déterminer objectivement si la famille a fait ou non des progrès et dans quels domaines, explique Nelly. Nous pouvons ainsi ajuster la trajectoire de chaque famille et travailler ensemble à son autonomie. La base de données devient donc aussi un outil important pour la gestion axée sur les résultats. »


Travail ciblé avec les communautés

Si l'on rassemble toutes les analyses individuelles des 2 000 familles participantes, on peut analyser les tendances par zone. En effet, en plus de l’accompagnement individuel des familles, le programme s'appuie aussi sur la capacité des communautés locales à soutenir les familles.

« Toutes ces données mises ensemble nous permettront à terme d'adapter nos actions pour les communautés à des situations spécifiques. C'est un point dans lequel nous voulons nous investir fortement dans les prochaines années », souligne Nelly.

« On peut analyser les tendances par zone. »

« Par exemple, là où les chiffres sont plus préoccupants par rapport au niveau d’éducation et au chômage des jeunes adultes, nous pouvons nous concentrer davantage sur la formation professionnelle. Dans les communautés où la santé des enfants est une préoccupation majeure, nous pouvons nous concentrer davantage sur la collaboration avec les mutuelles. »

Assistants sociaux utilisant l'outil digital.

Assistants sociaux utilisant l'outil digital.


Un exemple pour les autres

La famille de Christine, veuve et mère de neuf enfants, vivait elle aussi dans une grande pauvreté. La famille devait se contenter d'un modeste repas par jour. Ses enfants étaient souvent renvoyés de l'école car elle ne pouvait pas payer les frais de scolarité. Dans une première phase, le programme Ŝanĝo a pris ces coûts en charge pour que leurs besoins de base soient satisfaits.

Cela a permis à Christine de renforcer ses capacités économiques avec l’accompagnement d'un assistant social. Elle a reçu une chèvre et a développé un commerce de yaourts. Son fils Daniel a aussi emprunté un beau chemin. Il est devenu un participant actif d’un club des droits de l'enfant, aide sa mère dans l'entreprise familiale et suit une formation pour devenir soudeur.

« La famille devait se contenter d'un modeste repas par jour. »

Aujourd'hui, Daniel organise même des actions de sensibilisation aux droits de l'enfant à la radio locale : d’abord participant du programme, il est maintenant devenu un modèle pour les autres.

Changement induit par les citoyens

Avec son parcours, Daniel illustre bien le principe du changement induit par les citoyens. « Nous parions sur les forces et les organisations qui sont déjà présentes dans la communauté », explique Oscar, coordinateur du programme. « Nous impliquons la communauté dans la recherche des familles que nous voulons soutenir et dans l’identification des solutions. Ainsi, elles font partie intégrante de ces solutions. »

« Nous aidons par exemple les enfants et les jeunes à défendre eux-mêmes leurs droits. Nous le faisons notamment par le biais de clubs des droits de l'enfant, créés par et pour les jeunes de la communauté, qui sensibilisent aussi bien les enfants que les adultes. »

« Un changement durable est notre objectif. Et cela n'est possible que s'il existe un réseau social solide autour des familles. »

Oscar

« Nous travaillons aussi avec les associations villageoises d’épargne et de crédit, qui peuvent aider les familles participantes via un microcrédit. Nous rassemblons les familles autour d'une activité économique qu'elles peuvent réaliser ensemble, comme une sorte de coopérative. Le tissu social se développe ainsi autour des familles et un réseau de soutien se crée, qui peut continuer d’exister indépendamment du programme. »


Collaborer ensemble est le seul moyen

Le défi d'une telle approche holistique est de rassembler des expertises de différents domaines.  C'est pourquoi il est essentiel de travailler avec un réseau de partenaires.

« Nous collaborons avec d'autres ONG, comme War Child pour former des clubs des droits de l'enfant locaux, et la Croix-Rouge pour l'orientation des participants et des volontaires, explique Oscar. Mais aussi avec les services gouvernementaux pour les actes de naissance et les exonérations de frais de scolarité, ainsi qu’avec les associations locales qui jouent un rôle dans le soutien des familles en difficulté. »

« Un changement durable est notre objectif. Et cela n'est possible que s'il existe un réseau social solide autour des familles. »


Cet article est une contribution de SOS Villages d’Enfants publiée initialement en néerlandais sur le site Sociaal.Net. Cette contribution s'inscrit dans le dossier "Sociaal werk in de wereld" (« Le travail social dans le monde »). Dans le monde entier, les professionnels du secteur social et leurs organisations travaillent chaque jour à améliorer durablement la situation des personnes vulnérables. Mais ces connaissances et cette expertise sont rarement diffusées. En collaboration avec 11.11.11, l'organisation qui chapeaute le Vlaamse Noord-Zuidbeweging, Sociaal.Net veut changer cela.

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